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Veille Scientifique #10 : Kinésithérapie respiratoire chez des patients avec une infection à COVID-19 en phase aigüe

18 mai 2020 Association
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Kinésithérapie respiratoire chez des patients avec une infection à COVID-19 en phase aigüe : un article de position de l'association italienne de kinésithérapie respiratoire

 

Référence originale : Lazzeri M, Lanza A, Bellini R, Bellofiore A, Cecchetto S, Colombo A, et al. Respiratory physiotherapy in patients with COVID-19 infection in acute setting: a Position Paper of the Italian Association of Respiratory Physiotherapists (ARIR). Monaldi Arch chest Dis = Arch Monaldi per le Mal del torace [Internet]. 2020;90(1). Available from: http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/32236089

 

Résumé proposé par  Quentin Jaumier  et Alice Kozoulia 

 

L'association italienne de Kinésithérapie Respiratoire (ARIR) propose dans cet article plusieurs conseils concernant la ventilation des patients infectés par le Covid-19, la physiothérapie, la gestion des services concernés ainsi que la protection des personnels soignants. Ils précisent que ce ne sont que des indications, qui feront l'objet d'actualisations. Elles doivent être adaptées aux recommandations émises par les autorités compétentes.

Les patients développant une pneumonie due au Covid-19 présentent des infiltrats interstitiels bilatéraux, un syndrome de détresse respiratoire aigüe caractérisé par une grave hypoxie. Le rapport ventilation/perfusion peut être fortement perturbé avec une possible apparition de shunts. Les patients en hypoxémie aigüe peuvent présenter une dyspnée persistante malgré une administration d'oxygène à des débits de 10 à 15 L/min via un masque à réservoir. L'hypoxie peut s'aggraver rapidement, requérant une mise sous ventilation mécanique. 

Concernant les patients respirant spontanément nécessitant une oxygénothérapie, les masques sont préférables plutôt que les lunettes nasales qui induisent une forte dispersion de gouttelettes. Il faut systématiquement ajouter un masque chirurgical, quel que soit le dispositif, pour réduire cette dispersion. Si le patient présente une détresse respiratoire, la ventilation non invasive (VNI), la ventilation en pression positive continue (CPAP) ou l'oxygénation nasale à haut débit (HFNO) peuvent permettre d'éviter ou retarder une intubation endotrachéale. Les dispositifs à favoriser sont les casques ou les masques en circuits fermés

La position du patient est primordiale. Il faudra privilégier une station assise ou semi-assise ainsi que, si possible, des alternances de latéro-cubitus aidés de coussins pour permettre une position stable et sans travail musculaire du patient. Il est important d'évaluer attentivement le patient car un changement de position peut modifier le rapport ventilation/perfusion et perturber les échanges gazeux.

Les patients bénéficiant de ces dispositifs non invasifs doivent toutefois être monitorés et il est important de se limiter à une seule tentative de mise en place de techniques non-invasives. La technique devra être rapidement abandonnée pour une intubation et mise sous ventilation mécanique si l'état du malade ne s'améliore pas dans l'heure. En effet, un retard dans l'intubation endotrachéale par utilisation prolongée de VNI est corrélé à une augmentation du taux de mortalité. 

Sous ventilation mécanique, afin de limiter la dispersion des gouttelettes, il est recommandé de :

  1. a) Vérifier quotidiennement la pression du ballonnet de la sonde endotrachéale (entre 25 et 30 cmH2O)
  2. b) Préférer les inhalateurs à sec ou les nébuliseurs à ultrasons connectés au ventilateur mécanique en circuit fermé plutôt que des nébuliseurs à jet pneumatiques.

Les techniques de drainage bronchique et de recrutement pulmonaire ne sont pas indiquées (sauf rares exceptions) car elles induisent un risque de contamination pour le soignant et accentuent la fatigue respiratoire du malade. Les manœuvres non nécessaires doivent être réduites, surtout celles qui pourraient diminuer la pression expiratoire positive (PEP).En effet, elles présentent un risque de dérecrutement pulmonaire et d'atélectasies. Toujours pour éviter une perte de PEP, il est préférable de ne pas déconnecter le patient du ventilateur, notamment dans le cas des aspirations endotrachéales. Elles ne doivent être effectuées que dans quelques indications strictes. Si elles sont requises, les aspirations en circuits clos permettent d'éviter une diminution de la PEP, et la dispersion de gouttelettes.

Le décubitus ventral est recommandé durant 12 à 16 heures par jour, de préférence dans les 72h suivant l'intubation. Il doit être mis en place en respectant la sécurité des soignants et en prenant soin de bien installer le patient pour éviter les escarres. S'il est efficace, il doit être répété jusqu'à amélioration du rapport Pa/Fi (>150 mmHg) au moins 4h après un retour en décubitus dorsal (avec une PEP <10cmH2O et une FiO2 de moins de 60%). Le procubitus ne doit pas être maintenu en cas d'aggravation du patient (diminution de 20% du Pa/Fi).

Les effets secondaires devront être surveillés : sevrage difficile, escarres, pneumonie acquise sous ventilation mécanique, thromboembolie veineuse, neuro-myopathies graves.

Dès que l'état clinique du patient est stable, la mobilisation active précoce pourra être débutée. Avant cela, la mobilisation passive du malade sera privilégiée. Les traitements choisis par le kinésithérapeute ne devront pas augmenter la charge ventilatoire au risque de créer une détresse respiratoire. Il est donc recommandé de ne pas pratiquer : 

- respiration diaphragmatique

- respiration lèvres pincées

- hygiène bronchique/techniques de réexpansion pulmonaire (bulleur, Systèmes PEP type EzPAP®, appareils d'aide à la toux, etc.)

- spirométrie incitative

- mobilisation manuelle/étirement de la cage thoracique

- lavage nasal

- renforcement des muscles respiratoires

- exercices d'entrainement 

- mobilisation pendant l'instabilité clinique (avis multidisciplinaire requis)

Enfin, cet article insiste sur la nécessité de protéger les soignants d'une contamination par le virus. Il est recommandé de suivre les instructions données dans les documents produits par l'Organisation Mondiale de la Santé ou les Organisations Nationales de Santé concernant les équipements personnels de protection pour la prise en charge des patients atteints de COVID-19. Chaque malade devra porter un masque chirurgical. Il devra être changé toutes les 6 à 8h. Les soignants doivent quant à eux porter un masque FFP2 voire FFP3. Les règles habituelles de pose de filtre sur les dispositifs de ventilation mécanique et non invasive sont toujours de mise. Attention toutefois à ne pas augmenter les résistances ce qui demanderait au patient un travail ventilatoire majoré.

Il faut rechercher la meilleure stratégie pour le patient tout en protégeant l'équipe soignante. Cela passe par l'organisation de l'environnement de travail et les postes afin de diminuer les risques de contamination et d'optimiser la disponibilité des équipements personnels de protection.

image téléchargé sur pixabay.com




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